Les autres stations américaines

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la présence militaire américaine à Terre-Neuve sétendait au-delà de ses bases militaires et navales de St. Johns, Stephenville et Argentia et englobait des stations plus petites sur lensemble de lîle.

Le transport de matériaux de construction, vers 1942
Le transport de matériaux de construction, vers 1942
Des travailleurs affectés à la construction dune station-relais près de St. Andrews (dans la vallée de Codroy) gravissent un flanc de montagne escarpé en transportant des matériaux.
Photographe inconnu. Avec la permission des Archives d`histoire maritime (PF-306.1017), Memorial University of Newfoundland, St. Johns, T.-N.-L.

Destinées à renforcer la défense du pays, ces installations comportaient des stations-radars, des émetteurs radiotélégraphiques et des stations-relais utilisés pour établir un réseau de communication à la grandeur de lîle. Certains sites, comme les stations-relais, étaient de grands projets dont la construction requérait de laide extérieure, tandis que dautres sites, dont la station-radar de Sandy Cove (sur lîle Fogo), étaient aménagés en secret à linsu des résidents locaux.

Stations-relais sur longues lignes

Peu après le début de la construction des bases américaines à Terre-Neuve au début de 1941, il est devenu évident que le système de communication de lîle ne serait pas assez performant. Le service téléphonique de lîle de Terre-Neuve nétait pas toujours fiable et desservait principalement les grands centres, tandis que le Labrador navait aucun service téléphonique. On prévoyait quil serait impossible aux Américains postés dans les différentes bases de lîle de communiquer facilement entre eux, et encore moins avec les bases situées aux États-Unis et au Canada.

Par conséquent, au milieu de lannée 1941, les Américains ont décidé dinstaller leur propre réseau de télécommunications sur lîle. En avril 1941, lArmée américaine a consacré 3,5 millions de dollars à linstallation de câbles aériens à travers lîle, avec la précieuse collaboration de la Compagnie de téléphone Bell du Canada.

Opérations d'entretien quotidien, 1943
Opérations d'entretien quotidien, 1943
Deux soldats américains examinent une ligne téléphonique. En mars 1943, environ 20 000 poteaux téléphoniques et 850 km (527 milles) de câbles avaient été installés sur lîle de Terre-Neuve.
Photographe inconnu. Avec la permission des Archives d`histoire maritime (PF-306.1004), Memorial University of Newfoundland, St. Johns, T.-N.-L.

En mars 1943, environ 20 000 poteaux téléphoniques et 850 km (527 milles) de câbles avaient été installés entre St. Johns et Stephenville, et au sud-ouest en direction de St. Andrews, dans la vallée de Codroy (suivant essentiellement la même route que le chemin de fer de lîle). Linstallation du réseau, appelé le Long Line System (Système sur longues lignes) employait environ 300 travailleurs de Bell et 700 Terre-Neuviens.

Sept stations-relais habitées ont aussi été construites tout le long des câbles, lesquelles étaient espacées denviron 100 km (60 milles). Ces stations logeaient de 10 à 15 soldats qui assuraient le service de communication 24 heures sur 24 en respectant des quarts de travail de 12 heures. Il y avait aussi 57 stations-relais non habitées espacées de 11 km (7 milles) dintervalle dispersées sur lîle.

En 1945, la fin de la guerre a occasionné une réduction de la main-dœuvre dans de nombreuses stations-relais. Cette décroissance a continué au fur et à mesure quon installait de léquipement de communication plus avancé dans les bases. En 1949, toutes les stations-relais ont été fermées, démolies ou vendues à lentreprise privée.

Les stations-radars

Le mot radar est un acronyme de Radio Detecting and Ranging (détection et télémétrie par radioélectricité). Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la capacité dun radar à déterminer la vitesse, la direction et la position des navires, avions et autres objets en mouvement sest avérée capitale pour la défense de Terre-Neuve. Même sil sagissait dune technologie relativement nouvelle au moment où la guerre a éclaté, le radar est vite devenu indispensable à larmée américaine, qui a installé cinq sites-radars sur lensemble de lîle avant janvier 1942 – à Allans Island, St. Brides (tous deux près de la base dArgentia), Torbay (près de Fort Pepperrell), Sandy Cove (sur lîle Fogo) et Bonavista.

Le 685e Air Warning Squadron (Escadron américain), 1943
Le 685e Air Warning Squadron (Escadron américain), 1943
Le site-radar de Sandy Cove était le plus actif de toutes les stations-radars américaines de Terre-Neuve pendant la Deuxième Guerre mondiale.
>Photographe inconnu. Avec la permission des Archives d`histoire maritime (PF-306.1041), Memorial University of Newfoundland, St. Johns, T.-N.-L.

À lété 1942, des travailleurs sont arrivés dans la petite collectivité de Sandy Cove, sur lîle Fogo, pour construire la première station-radar à Terre-Neuve. Le site sest avéré le plus actif de toutes les stations-radars américaines sur lîle. Il servait à surveiller le trafic de Gander à Goose Bay, ainsi que dans lAtlantique dans un rayon de 240 km (150 milles). Les Forces armées canadiennes et américaines à Gander et Fort Pepperrell lutilisaient également comme poste de pré-alerte pour déceler lapproche ennemie.

La construction des quatre autres stations-radars de lîle a commencé à lautomne 1942 et a pris fin au début de 1943. Ces sites servaient principalement à détecter les mouvements daéronefs au-dessus de Terre-Neuve et dans les environs et à envoyer toutes les données à un centre de pointage radar à Fort Pepperrell. Ces opérations étaient classées Top Secret (Très secret) par lArmée américaine et, jusquen 1944, on a fait croire aux Terre-Neuviens qui habitaient à proximité que cet équipement servait à surveiller les systèmes météorologiques.

Limportance des stations-radars terrestres a diminué vers la fin de la guerre alors que des percées technologiques ont permis dinstaller des radars sur les avions et les navires alliés. LAviation royale canadienne assumait le contrôle de toutes stations-radars américaines en mai 1944. Quand la guerre a pris fin un an plus tard, tous les sites ont été démantelés et remis au gouvernement de Terre-Neuve.

La Garde côtière des États-Unis et les stations LORAN

Les membres de la Garde côtière des États-Unis ont aussi maintenu une présence à Terre-Neuve-et-Labrador pendant Deuxième Guerre mondiale en travaillant sous la supervision de la US Navy. Ils avaient pour mission dinstaller et de maintenir les puissants émetteurs radiotélégraphiques et récepteurs de radioalignement utilisés pour déterminer la position des bateaux ou des avions.

Ce système de radionavigation, appelé LORAN (Long Range Navigation), a été installé à Mouse Island (près de Port aux Basques), Twillingate et Bonavista, ainsi quà Battle Harbour au Labrador. Le principal rôle des stations LORAN était de surveiller lactivité des U-boot et de fournir de laide à la navigation aux navires alliés. Il sagissait dune mission confidentielle et léquipement était surveillé 24 heures par jour.

La station LORAN de Battle Harbour, 1943
La station LORAN de Battle Harbour, 1943
La Garde côtière des États-Unis a installé des stations LORAN à Mouse Island, Twillingate, Bonavista, et Battle Harbour.
Photographe inconnu. Avec la permission des Archives dhistoire maritime (PF-306.944.006), Memorial University of Newfoundland, St. John's, T.-N.-L.

Les sites, construits en 1942, avaient été prévus pour être autonomes et employaient leurs propres cuisiniers, aides-soignants et mécaniciens en plus des techniciens responsables du fonctionnement des transmetteurs. Environ 30 membres de la Garde côtière des États-Unis étaient affectés à chacune des stations LORAN.

À la fin de la guerre, la Garde côtière des États-Unis a fermé la station LORAN de Twillingate, mais elle a continué dexploiter les autres sites de Terre-Neuve-et-Labrador jusquen 1953, année où le gouvernement canadien en a pris le contrôle.

La station radiogoniométrique de Wesleyville

En 1942, lArmée américaine a décidé dinstaller une radiobalise spéciale sur la côte est de Terre-Neuve pour aider à guider les avions alliés arrivant ou partant de lAngleterre. Laérodrome de Gander était alors une base auxiliaire de lAtlantic Ferry Command, qui était chargé de transporter vers la Grande-Bretagne les avions militaires récemment construits en Amérique du Nord. Cette situation a contribué à augmenter le trafic aérien dans le ciel de Terre-Neuve et a nécessité du nouvel équipement de navigation.

LArmée américaine a jugé que Wesleyville, une collectivité côtière de la baie de Bonavista, était le site idéal pour installer la station radiogoniométrique parce quelle très à lest et à proximité de Gander. En 1942, la construction a été retardée à cause dune barge de lArmée américaine qui a coulé alors quelle se dirigeait vers Wesleyville. Ce nest quau début de lannée suivante que la station est devenue complètement opérationnelle avec environ 20 militaires membres du personnel des communications.

La principale fonction de la station était démettre un faisceau électromagnétique vers Preswick, en Écosse, que les pilotes du Ferry Command pouvaient surveiller jusquà ce quil soit hors de portée. Elle transmettait aussi des données météorologiques toutes les heures à Gander.

La station émettrice de Snelgrove

En 1943, lArmée américaine a construit une grande station émettrice à Snelgrove, près du lac Windsor à St. Johns. Cette installation enregistrait tous les signaux des sous-marins allemands et interceptait les transmissions en provenance des cinq stations-radars américaines de lîle. Le site était habité 24 heures par jour par des soldats de Fort Pepperrell qui se partageaient les quarts de travail.

Toutes les opérations effectuées à la station émettrice étaient considérées Top Secret et une haute clôture en fil de fer entourait les quatre bâtiments du site. Aucun civil ne travaillait sur les lieux et seul les membres du personnel militaire munis de laissez-passer spéciaux étaient autorisés à franchir cette clôture. La station a été fermée en 1946.

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