L'attrait du Labrador

Extrait des fichiers de The Gazette 22 janvier 1998.

Au début des années 1990, dans le cadre de leur recherche sur l'expédition tragique de Hubbard dans l'arrière-pays du Labrador en 1903, James West Davidson et John Rugge ont retracé Dillon Wallace III, fils de Dillon Wallace Junior, qui avait pris part à l'expédition de Hubbard. Le jeune homme, qui vivait à Beacon (État de New York), était en possession de ce qui avait survécu des documents de son père, une collection éclectique de journaux, de lettres, d'écrits manuscrits et dactylographiés, de coupures de presse, de photos et de verres de lanterne de projection, la plupart associés aux trois expéditions de son aïeul au Labrador.

Dillon Wallace
Dillon Wallace
Avec la permission des archives et collections spéciales (Coll - 244, 7.01.00s), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's (T.-N.-L.).

Dillon Wallace Junior, né à Craigsville, dans l'État de New York, le 24 juin 1863, était le fils de Dillon Wallace Senior et de Ruth Ann Ferguson. Après ses études secondaires et quelques années d'emplois divers, il est entré à la faculté de droit de New York en 1892, a obtenu son diplôme en 1896, a été admis au barreau en 1897 et a pratiqué le droit à New York durant plusieurs années.

Leonidas Hubbard
Leonidas Hubbard
Avec la permission des archives et collections spéciales (Coll - 244, 7.01.00s), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's (T.-N.-L.).

En 1900, Dillon Wallace a rencontré Leonidas Hubbard, rédacteur adjoint à la revue Outing. Hubbard, grand amateur d'exploration et d'aventures, a vite convaincu Wallace de se joindre à lui afin d'explorer l'intérieur du Labrador. Arrivés à North West River, au Labrador, à la mi-juillet 1903, Hubbard et Wallace, accompagnés par George Elson, un métis écossais-cri du nord de l'Ontario qu'ils avaient embauché comme guide, ont entrepris leur expédition qui, espéraient-ils, les conduirait, en remontant la rivière Naskaupi, jusqu'au lac Michikamau et, de là, à la rivière George à temps pour la chasse aux caribous annuelle des Naskaupi. Le manque d'expérience et une erreur d'orientation leur ont fait prendre la mauvaise rivière, rendant leur périple beaucoup plus long et exténuant. Leurs problèmes allaient être bientôt aggravés par le manque de vivres et l'approche de l'hiver.

George Elson (à g.) et Dillon Wallace durant leur expédition tragique au Labrador
George Elson (à g.) et Dillon Wallace durant leur expédition tragique au Labrador
Avec la permission des archives et collections spéciales (Coll - 244, 7.01.00s), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's (T.-N.-L.).

À la mi-septembre, presque sans vivres et encore à des milles du lac Michikamau, ils ont choisi de retourner vers North West River. Hubbard est mort de faim en cours de route. Wallace aurait subi le même sort si Elson n'avait pas repéré quatre trappeurs indigènes, qui l'ont aidé à transporter Wallace à North West River.

De retour à New York le printemps suivant, Wallace a conclu une entente avec Mina Hubbard, la veuve de Leonidas, en vue de publier un compte-rendu de l'expédition. Le livre qui en a résulté, The Lure of the Labrador Wild, publié en 1905, est vite devenu un best-seller, mais a provoqué une rupture irréconciliable entre Wallace et Mina Hubbard, qui l'a accusé d'avoir imputé injustement l'échec de l'expédition à son époux et d'avoir sali sa réputation.

Cette querelle entre Wallace et Mina Hubbard a été le motif de « la grande course de 1905 ». Après la publication de son livre, Wallace a annoncé qu'il planifiait compléter l'expédition avortée de 1903. En riposte, Mina Hubbard a décidé d'entreprendre une expédition similaire, dans le but de laver la réputation de son époux. George Elson allait l'accompagner. Cette histoire a fait la une des journaux.

Les deux groupes sont partis de North West River à quelques jours d'intervalle à la fin de juin 1905. Mina Hubbard a suivi de près l'itinéraire original de son mari sur la rivière, tandis que Wallace a préféré un parcours plus terrestre, ce qui allait se révéler une grave erreur. Le groupe de Hubbard a atteint le poste de la Compagnie de la Baie d'Hudson sur la rivière George six semaines avant celui de Wallace.

Malgré l'échec de la première expédition et sa défaite dans cette course contre Mina Hubbard, ses deux excursions au Labrador ont amené Dillon Wallace à changer de carrière. Il aimait la popularité que lui avait value la publication de The Lure of the Labrador Wild, et son récit de la deuxième expédition, The Long Labrador Trail (1907) a aussi été bien accueilli. Il s'est joint à l'équipe de la revue Outing, qui a commandité d'autres expéditions ailleurs dans le monde. Il a publié les comptes-rendus de ces aventures et a aussi écrit des romans et des récits pour la jeunesse.

Au fil des 30 années suivantes, il a fait paraître 26 autres livres et rédigé de nombreux articles pour Outing, National Sportsman, American Boy et d'autres magazines. En 1913, il a effectué une troisième expédition couronnée de succès au Labrador, en partie pour placer un jalon commémoratif à l'emplacement du dernier campement de Hubbard. Il a poursuivi sa pratique du droit à l'occasion, mais a essentiellement tiré sa subsistance de ses écrits et de ses tournées de conférences le reste de sa vie.

Sa première épouse, Jennie Currie, ayant succombé à la tuberculose en 1900 après seulement trois ans de mariage, il a épousé Leila Greenwood Hinman en 1917. Dillon et Leila ont eu deux enfants, Leila Ann et Dillon III. Dillon Wallace est mort à Beacon, dans l'État de New York, le 28 septembre 1939.

Dillon Wallace III a autorisé Davidson et Rugge à consulter les documents de son père, qui comprenaient les journaux qu'il a tenus à chacune de ses trois expéditions au Labrador, ses états financiers et un grand nombre de photos de ses voyages. Davidson et Rugge ont trouvé ces documents très utiles à leur recherche, et se sont servi d'extraits des journaux et de certaines des photos pour leur livre Great Heart.

Ils ont aussi encouragé Dillon à trouver pour les documents un abri plus sûr que la malle où ils étaient entreposés dans son sous-sol. Wallace a reconnu la justesse de ce conseil et les a éventuellement confiés au Service des archives et collections spéciales de Memorial University où, avec l'aide d'une subvention du ministère du Patrimoine canadien et d'Archives nationales du Canada, par l'entremise du Programme de contrôle des fonds documentaires du Conseil canadien des archives, ils ont été catalogués et demeurent à la disposition des chercheurs.

English version

Table des matières du Service des archives et collections spéciales (en anglais)