Les référendums de 1948

Les partisans de la Confédération ne sont pas très surpris de la décision du gouvernement britannique d'ajouter au référendum l'option d'union avec le Canada. Avant l'annonce du 11 mars de la tenue d'un référendum, la formation Confederate Association, dirigée par F. Gordon Bradley, entre en action le 21 février 1948. Son directeur de campagne est Joseph R. Smallwood.

J. R. Smallwood et F. Gordon Bradley, membres de la formation Confederate Association
J. R. Smallwood et F. Gordon Bradley, membres de la formation Confederate Association
Avec la permission de la Division des archives et collections spéciales (Collection J. R. Smallwood 075, photographie 5.05.314), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's, T.-N.-L.

Discorde chez les adversaires de la Confédération

Les adversaires de la Confédération sont plutôt déconcertés. Ils n'avaient pas anticipé la mise de côté des recommandations de la convention nationale. Qu'était devenu le sens de l'équité et de la justice des Britanniques ?

Deux formations, la Responsible Government League [RGL] et l'Economic Union Party [EUP] représentent les forces hostiles à l'union avec le Canada. La première demande simplement le rétablissement du gouvernement responsable tel celui de 1933. La deuxième voit le jour lorsque des membres un peu plus jeunes et insatisfaits du peu de progrès réalisés par la Responsible Government League depuis ses débuts en 1947, font défection. Le chef des rebelles est Chesley Crosbie. Cette deuxième formation favorise des liens économiques particuliers avec les États-Unis. La tension est vive entre ces deux groupes.

Chesley Crosbie, chef de la formation Economic Union Party
Chesley Crosbie, chef de la formation Economic Union Party
Tiré de "The Story of Confederation", The Book of Newfoundland de Joseph R. Smallwood, vol. III, Newfoundland Book Publishers, St. John's, T.-N.-L., © 1967, p. 73.

La division, l'absence d'une vraie direction et une organisation déficiente caractérisent la campagne contre l'union avec le Canada. Le sous-financement ne permet pas de préparer une véritable campagne professionnelle à l'échelle du dominion. Pourtant, les gens d'affaires et les nationalistes appuient fortement le mouvement contre l'entrée dans la Confédération.

La campagne contre l'union avec le Canada, 1948
La campagne contre l'union avec le Canada, 1948
De nombreuses habitations et entreprises s'affichent contre la Confédération.
Avec la permission des archives (Collection George Carter, boîte d'archives 5, MG910), The Rooms, St. John's, T.-N.-L.

La position de l'archevêque catholique Mgr E. P. Roche revêt une grande importance. Le journal publié par l'archidiocèse, The Monitor, se prononce clairement contre la Confédération.

La formation Confederate Association

Par contre, mieux financée et mieux organisée, la formation Confederate Association peut compter sur un solide réseau dans l'ensemble de l'île. Joseph Smallwood, Gordon Bradley et d'autres mènent une vigoureuse campagne et se montrent habiles et confiants. Joseph Smallwood prévoit que l'option de la Confédération recueillera entre 60 000 et 70 000 votes au référendum du 3 juin.

Les résultats lui donnent raison. L'option récolte en effet 64 066 votes, soit 41,1 p. 100 des votes exprimés. Pourtant, l'option du gouvernement responsable se démarque avec 69 400 votes (44,6 p. 100). L'option de la Commission de gouvernement arrive bonne dernière avec 22 311 votes (14,3 p. 100). Le deuxième référendum, qui a lieu le 22 juillet, n'offre plus cette troisième option.

Limites des circonscriptions et résultats du premier référendum de 1948
Limites des circonscriptions et résultats du premier référendum de 1948
Illustration de Duleepa Wijayawardhana, 1999.

Les partisans de la Confédération comprennent qu'ils ont la victoire à portée de main. Bon nombre de citoyens n'avaient pas voté en faveur du gouvernement responsable. Cette observation n'échappe pas non plus à la faction adverse. Ce résultat n'augure rien de bon. Les militants de la Confédération, pour leur part, sont dynamisés lorsqu'ils amorcent une deuxième campagne. Les formations Responsible Government League et Economic Union Party s'unissent, mais le découragement guette. Les anciens défenseurs de l'option du gouvernement responsable se montrent circonspects et la campagne contre l'union n'est guère plus organisée.

Les partisans de l'union déploient deux stratégies pour s'assurer la victoire. D'abord, ils soulignent l'influence qu'a exercée l'Église catholique sur le premier référendum. Ils cherchent à inciter les citoyens de confession protestante à voter pour la Confédération. Au début de juillet, l'Association loyale d'Orange fait circuler une lettre parmi ces membres. Elle y dénonce les efforts de l'Église catholique pour imposer son point de vue et les met en garde contre les effets de cette influence qu'ils doivent combattre.

Les partisans s'en prennent ensuite aux membres de l'Economic Union Party qu'ils accusent de déloyauté, de nourrir un sentiment anti-britannique et d'être favorable à une république. Ils associent l'option de la Confédération à une position pro-britannique. Le nouveau slogan est donc « L'union britannique ». La réplique des adversaires consiste à inonder St. John's d'affiches clamant que la Confédération n'est autre qu'une union britannique avec le Canada français. À la suite de cette déplorable campagne, les partisans de la Confédération remportent la mise avec 78 323 votes (52,3 p. 100). L'option du gouvernement responsable obtient 71 334 votes (47,7 p. 100).

Limites des circonscriptions et résultats du deuxième référendum de 1948
Limites des circonscriptions et résultats du deuxième référendum de 1948
Illustration de Duleepa Wijayawardhana, 1999.

Les référendums

Au cours des deux référendums, les habitants de la péninsule d'Avalon votent pour le rétablissement d'un gouvernement responsable. Le reste du dominion choisit la Confédération. La plupart des circonscriptions dont la population est principalement catholique ont voté pour un gouvernement responsable. Les circonscriptions majoritairement catholiques de Placentia West et St. George's-Port-au-Port se rangent du côté des partisans de la Confédération lors du deuxième référendum.

Premier référendum
Gouvernement responsable Confédération Commission
Péninsule d'Avalon 67% 25% 8%
Autres circonscriptions 26% 54% 20%

Deuxième référendum
Gouvernement responsable Confédération
Péninsule d'Avalon 66% 34%
Autres circonscriptions 30% 70%


English version

Video: The Winding Road to Confederation Part V: The 1948 Referendums (en anglais)