Une ferme conviction
Au rédacteur en chef de l'Evening Telegram,
Monsieur – J'ai confiance en nos citoyens, en leur sens de la justice et du devoir, et en leur désir partagé d'un peu du bonheur et du bien-être qui leur sont dus en toute légitimité. Je prie pour que chaque électeur ait le courage et la décence de voter selon sa conscience et son libre arbitre, sans être intimidé par quelque individu, classe ou croyance que ce soit.
Quant à moi, je ne voterai certainement pas pour un retour au Gouvernement responsable tel qu'il existait en 1933. Voter pour ce système, tel qu'il existait alors et auparavant, serait faire injure à ma conscience. Pourquoi, au nom du Ciel, les membres de la Convention n'offrent-ils pas quelque système réformé ou remodelé pour le remplacer? Non, je suis incapable de cautionner un retour à la destitution, au chômage et à la famine. Le Gouvernement responsable s'est révélé incapable de donner à notre population, jeune, adulte ou vieillissante, une existence décente. Il n'a pas préservé notre santé. Il a été incapable de proposer une économie qui fonctionne. Il nous a soumis à un régime qui a été une honte pour tous les humains, fussent-ils libres ou subjugués. Enfin, après son bilan déplorable d'enfants et d'adultes mal nourris, son taux de tuberculeuse effrayant et ses adultes anémiques, comme l'ont illustré les refus du bureau de recrutement, il a jeté l'éponge.
Ce système avait tout faux et la population en paye encore le lourd tribut. Le Gouvernement responsable, tel qu'il a été et tel que le voudraient ceux qui réclament son retour, n'a jamais comblé les aspirations de notre peuple et n'y parviendra jamais.
Je vais voter pour la Confédération avec le Canada. Je suis convaincu qu'il s'agit d'un choix avisé et sain pour tout Terre-Neuvien désireux de régler nos plus gros problèmes, de sorte que nous puissions enfin progresser. Parce que cette union signifie que nous nous unissons comme par un mariage : nous n'avons ni à acheter le Canada, ni à vendre Terre-Neuve. Le Canada nous offrira en dot sa culture, son coût de la vie plus abordable, les atouts de ses industries, des normes de santé supérieures, de meilleurs transports, une économie stable, ses allocations familiales et ses pensions de vieillesse, ainsi que des perspectives d'avenir décentes pour nos jeunes. Nous deviendrons membres légitimes de ses assemblées et, de ce fait, de celles du monde entier. Quelle dot Terre-Neuve apportera-t-elle en retour? Nous apporterons nos propres personnes, ces citoyens honnêtes, croyants, libres, énergiques, courageux, animés de l'esprit d'entreprise que nous sommes – une race dont le caractère a été trempé aux flammes de l'adversité. Apportons notre pays, avec ses splendeurs, ses avantages comme ses inconvénients – et unissons cette Amérique du Nord Britannique dans l'intérêt de tous.
Si le 3 juin devient le jour de nos fiançailles, ce sera un jour béni pour nous tous tant que nous sommes et pour tous ceux qui naîtront à Terre-Neuve.
Puisse Dieu exaucer nos souhaits!
Veuillez agréer mes salutations distinguées,
UN JEUNE ÉLECTEUR
Le 28 mai 1948
Reproduit avec l'autorisation de The Evening Telegram. Extrait de "According to Conviction," The Evening Telegram, 31 mai 1948, p. 6.