Appel à tous les patriotes

Au rédacteur en chef du Daily News,

Monsieur - Désormais, le 22 juillet 1948 se distinguera comme un jour d'ignominie dans les annales de la longue histoire de notre pays. Il n'est pas étonnant que le ciel ait noyé notre belle contrée de larmes copieuses et que le soleil ait refusé de pénétrer les nuées qui nous recouvrent depuis ce jour fatidique où l'âme de Terre-Neuve a été réduite en lambeaux et où soixante-et-onze de ses loyaux patriotes ont mordu la poussière, cette fois aux mains de leurs propres concitoyens.

N'était-il pas suffisant que la Grande-Bretagne nous humilie aux yeux du monde entier en rompant son serment de nous rendre notre droit divin? Durant quatre siècles de guerres, d'adversité, de privations et de luttes de toutes sortes, notre peuple a vécu en paisible harmonie. Aujourd'hui, nous sommes divisés comme Juifs et Arabes, et la discorde et les querelles déchirent ce pays jadis paisible.

Il y a moins d'un court mois, nous nous sommes rendus à notre Monument aux Morts national pour rendre un hommage solennel et floral à nos héros disparus, exilés à jamais de leur sol natal, tandis que Sullivan, cet ardent partisan de l'union, aura été épargné. Comme nous nous souviendrons d'eux avec fierté et chagrin, ainsi que des cœurs brisés et des foyers attristés de nos honorables défunts, nous nous souviendrons aussi avec mépris et dédain de notre Confédéré, de notre « Barrelman » perdu, ce Smallwood qui, au gré du débat, a mieux fait connaître Terre-Neuve aux Terre-Neuviens et aux mercenaires défenseurs de la Confédération.

Nous avons peut-être avalé la coupe de l'humiliation, mais nous refusons de boire sa lie amère en nous inclinant devant Ottawa.

Nous sommes des patriotes, fiers de nos Terre-Neuviens combattants et, à ce titre, nous nous tiendrons debout jusqu'au jour où nous retournerons à la poussière de cette terre bien-aimée qui nous a donné le jour.

Sincèrement vôtre,
J. M. CONNORS

St. John's.

English version


Reproduction autorisée par la Banque Toronto-Dominion. Extrait de J. M. Connors, "Calling All Patriots," The Daily News, 2 août 1948, p. 4.