L'histoire de Bristol jusqu'à 1497 : l'arrivée de Jean Cabot à Bristol

Avec sa femme et ses trois fils, Jean Cabot quitte l'Italie pour l'Espagne, puis pour l'Angleterre. Ils s'installent à Bristol entre 1493 et 1495. À Venise, Jean Cabot pratiquait le commerce des épices, des teintures et des soies orientales avec la ville d'Alexandrie en Égypte. Il est sans doute au courant de l'excellente réputation commerciale du port de Bristol. Il a probablement noué des liens avec des marchands de cette ville avant d'amener sa famille en Angleterre.

La ville de Bristol, vers 1480
La ville de Bristol, vers 1480
Cette carte illustre l'étendue de la ville vers la fin du 15e siècle, peu avant l'arrivée de Jean Cabot.
Adaptée d'une carte dessinée par E. M. Carus-Wilson et tirée de The Merchant Adventurers of Bristol in the Fifteenth Century, The Bristol Branch of the Historical Association, Bristol, Angleterre, © à partir d'une carte antérieure dessinée par William Hunt, et tirée de Bristol, Longmans, Green & Co., Londres, 1887, 2e édition.

Jean Cabot tient beaucoup à découvrir un passage à l'ouest. Cette route vers l'Asie sera plus directe que le contournement de l'Afrique, il en est persuadé. La découverte par Christophe Colomb en 1492 des îles qui portent aujourd'hui le nom d'Antilles pour le compte de l'Espagne exacerbe l'urgence de la situation. Cet exploit a ruiné les chances de Jean Cabot d'obtenir le patronage des souverains espagnols. Christophe Colomb réside en Espagne et au Portugal depuis longtemps, et il revient de son expédition avec des preuves concrètes. Jean Cabot doit s'adresser ailleurs (Little, p. 11).

Le roi Henri VII

Lorsque ses démarches à Séville en Espagne et à Lisbonne au Portugal n'aboutissent à rien, Jean Cabot n'a d'autre choix que de chercher un nouveau commanditaire. Celui-ci n'est autre que le roi d'Angleterre, Henri VII. Jean Cabot lui offre la possibilité de trouver une route septentrionale vers l'Asie (dénommée passage du Nord-Ouest dans les années à venir) et de revendiquer une région du monde que n'ont pas encore investi les Espagnols et les Portugais. L'Angleterre pourrait ainsi faire une brèche dans la domination de l'Espagne et du Portugal sur le monde connu.

Le roi Henry VII, 1505
Le roi Henry VII, 1505
Le roi Henri VII finance l'expédition transatlantique de Cabot.
Artiste néerlandais inconnu. Image tirée du site Web de la National Portrait Gallery, Londres, à des fins non commerciales en vertu des termes du contrat de licence : Creative Commons Attribution-Non-Commercial-NoDervis (CC BY-NC-ND 3.0).

Le roi Henri VII se rend à Bristol en 1486 et de nouveau en 1490. La venue du roi d'Angleterre souligne l'importance financière, économique et politique de ce port pour le pays. Au cours de ces visites, il s'est sûrement entretenu avec ses plus éminents citoyens et aurait abordé les sujets du commerce et des voyages transatlantiques. Le souverain sait pertinemment qu'il lui faut l'appui des marchands anglais. Bristol représente un élément stratégique vital.

Henri VII avait refusé de financer l'expédition vers les Indes des frères Colomb. Peut-être s'était-il déjà engagé envers les marchands de Bristol. Du moins se doute-t-il de leurs visées sur l'Atlantique. Désireux de maintenir de bonnes relations avec cette puissante ville, il a fort probablement des scrupules à donner son appui à des rivaux (Little, p. 14).

L'expédition de Christophe Colomb déclenche inévitablement une vive compétition entre les pays européens pour la découverte de nouveaux territoires et de nouvelles routes maritimes vers les riches marchés d'épices de l'Orient. Le roi Henri VII n'a pas d'autre choix que de riposter aux dernières conquêtes de l'Espagne. Il se montre donc plus ouvert à la proposition de Jean Cabot.

L'Angleterre soutient l'expédition de Jean Cabot

La volonté de l'Angleterre à parrainer une expédition si risquée répond également à la nécessité croissante de trouver de nouveaux lieux de pêche. Pendant la majeure partie du 15e siècle, les activités commerciales entre Bristol et l'Islande sont fructueuses. Les marchandises échangées sont, entre autres, du bois contre de la morue séchée appelée simplement à l'époque poisson séché. Conservée aux Archives nationales à Kew en Angleterre, une grande partie des registres des douanes de Bristol témoignent de ces échanges commerciaux avec l'Islande sous les règnes des rois Édouard IV (1461 à 1483) et Henri VII (1485 à 1509). Voici un exemple de registre datant de 1471:

Le bateau appelé Antoni du port de Bristol avec pour capitaine John Deanfitz arrive de l'Islande ce jour (10 septembre) ayant à son bord des étrangers (ayant droit de cité) et une cargaison pour John Forster, xxxv de lingue franche, d'une valeur de lxx livres, une subvention de lxx shillings pour le même, xv de poisson séché d'une valeur de lxxv livres, une subvention de lxxv shillings pour John Gregorie étranger ayant droit de cité, du poisson salé d'une valeur de x livres, une subvention de x shillings (Williamson, 1962, p. 176).

Des problèmes compliquent le commerce avec l'Islande. La Ligue hanséatique parvient à évincer les marchands de Bristol de ce pays en 1480. Des bateaux, partant du port de Bristol, se risquent alors à un début d'exploration de l'océan Atlantique avant les grandes expéditions de Christophe Colomb et de Jean Cabot. À partir des années 1480, les marchands de Bristol sont en quête de territoires inconnus situés plus à l'ouest, en partie pour satisfaire à une forte demande pour la morue. Il est probable que les Anglais veulent aussi revendiquer des routes maritimes que ne se sont pas encore arrogées l'Espagne ou le Portugal. Ils veulent posséder leur propre passage au nord-ouest, ainsi qu'une part du commerce des épices de l'Asie. Ils feraient ainsi concurrence aux Espagnols qui sont persuadés à tort que Christophe Colomb a découvert la route des Indes en 1492. Ces aventuriers cherchent l'île mythique de Brasil située, selon la légende, sur le littoral occidental de l'Irlande. Les marins de la fin du Moyen Âge ne doutent pas de l'existence de l'île des Sept-Cités dont l'emplacement se situe hypothétiquement dans le secteur ouest ou nord-ouest de l'Atlantique (Williamson, p. 19, 22).

Nous savons que les marins de cette époque sont convaincus de la véracité des histoires qui entourent ces îles. Des cartes médiévales encore intactes nous le prouvent. Elles montrent l'île de Brasil, une petite masse ronde ou en demi-lune située près des côtes irlandaises. Nous ignorons à quel moment précisément s'amorcent les premières expéditions vers ces îles fantômes que financent les marchands de Bristol. Nous savons toutefois que le marchand John Jay fils finance une expédition en 1480. C'est un échec, mais une autre expédition aura lieu l'année suivante (Williamson, p. 20; Little, p. 13; McGrath, p. 1).

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