L'industrie pétrolière et l'économie
Le pétrole, aussi appelé brut (ou pétrole brut), est l'une des denrées les plus précieuses sur les marchés de la planète. Constituant un peu plus du tiers des réserves énergétiques mondiales, il est vital pour nombre d'industries et de nations. Le pétrole est un liquide naturel noir et visqueux qui peut être raffiné pour produire de la gazoline, du carburant diesel, du kérosène, du carburant aviation, de l'huile pour moteurs, de l'asphalte, de la paraffine et quantité d'autres produits. Le prix du pétrole, normalement élevé, fluctue de jour en jour en fonction de divers facteurs comme l'offre et la demande, l'économie mondiale, les problèmes environnementaux et les guerres ou autres dynamiques dans les pays acheteurs ou producteurs.
Photographe inconnu. Avec la permission de Petro-Canada.
L'industrie pétrolière extracôtière a beaucoup contribué à l'économie de Terre-Neuve-et-Labrador ces dernières décennies. Elle crée des emplois, ajoute aux recettes de la province, contribue à limiter l'exode de la population, stimule les dépenses de consommation et exerce une influence indirecte sur d'autres secteurs de l'économie comme l'immobilier, l'éducation, la recherche, la fabrication et la vente de détail. En 2008, trois champs pétrolifères produisaient du brut au large de la province : Hibernia, Terra Nova et White Rose. Un quatrième champ, Hebron, devrait entrer en production en 2017. Divers forages d'exploration ont montré l'existence d'autres gisements pétrolifères susceptibles de présenter un potentiel commercial au large de Terre-Neuve-et-Labrador.
Champs de pétrole de Terre-Neuve-et-Labrador
C'est en 1979, après quelque 13 ans de forages sous-marins exploratoires, que les chercheurs ont découvert le premier gisement pétrolier exploitable au large de l'île, Hibernia, dans le bassin Jeanne d'Arc des Grands Bancs, à environ 315 km à l'est de St. John's. La construction de la plate-forme et des autres structures d'extraction a débuté en 1990 et Hibernia a produit son premier baril de pétrole en 1997. Les spécialistes de l'industrie et du gouvernement estiment que ce réservoir contient environ 884 millions de barils de pétrole récupérable, ce qui en fait le plus riche gisement exploité dans la province.
Artiste inconnu. Avec la permission de Petro-Canada.
Durant les années 1980, trois autres champs de pétrole ont été découverts dans le bassin Jeanne d'Arc : Terra Nova, White Rose et Hebron. L'exploitation du champ Terra Nova a commencé en 2002; on estime qu'il contient 354 millions de barils de pétrole récupérable Le champ White Rose, dont la production a débuté en 2005, devrait ajouter autour de 286 millions de barils. Le dernier champ, Hebron, devrait entrer en production en 2017, les travaux préparatoires du projet ayant commencé en 2012. Selon les autorités, Hebron contiendrait autour de 700 millions de barils de pétrole, ce qui en ferait le deuxième gisement commercial connu en importance à Terre-Neuve-et-Labrador.
Les réserves de pétrole de la province n'étant pas renouvelables, chaque champ aura une vie limitée. On estime que Hebron produira du pétrole pendant 25 ans, Hibernia pendant 20 ans, White Rose pendant 15 ans et Terra Nova pendant 10 ans. Ceci dit, des sociétés pétrolières comme Husky Oil et Petro-Canada sont toujours en quête de nouveaux gisements sous-marins, notamment sous les Grands Bancs, le plateau du Labrador et les fonds extracôtiers de l'ouest et du sud de Terre-Neuve.
Le pétrole et l'économie provinciale
Même si l'industrie pétrolière et gazière fait figure de nouvelle venue dans l'économie de Terre-Neuve-et-Labrador, elle en est vite devenue un élément clé. Entre 1997 et 2007, Hibernia, Terra Nova et White Rose ont produit 867 millions de barils de pétrole brut, évalués à environ 46 milliards de dollars. En 2007, l'industrie était responsable de 35 p. 100 du PIB de la province, par rapport à 13 p. 100 en 1999 et 24,3 p. 100 en 2004. Selon Statistique Canada, la croissance économique de Terre-Neuve-et-Labrador en 2007 a éclipsé celle de toutes les autres provinces canadiennes essentiellement grâce à la performance de ses industries pétrolière et minière.
Photographe inconnu. Avec la permission de Petro-Canada.
Le secteur du pétrole et du gaz naturel donnait de l'emploi à 2 851 travailleurs en 2007, ce qui représentait 1,3 p. 100 de la main d'œuvre provinciale. Au 31 mars 2008, de 88 à 94 p. 100 de tous les travailleurs d'Hibernia, de Terra Nova et de White Rose étaient des résidents de Terre-Neuve-et-Labrador, et presque tous (entre 95 et 99 p. 100) étaient des Canadiens. La vague d'activités de construction préalables à la production de pétrole est une importante source d'emploi pour les travailleurs locaux. Entre 1990 et 1997, quelque 5 800 travailleurs ont construit à Bull Arm, dans la baie Trinity, les infrastructures de la tour de forage Hibernia. En outre, le secteur du pétrole et du gaz naturel crée de nombreux emplois indirects pour les travailleurs d'autres industries et entreprises, ajoutant ainsi 3,8 p. 100 à la population active de la province en 2007.
Une croissance de l'emploi entraîne une hausse des dépenses, qui profitent à d'autres secteurs de l'économie. Ainsi, on a attribué à l'industrie pétrolière la construction de 119 maisons en 2004 et des ventes de détail de quelque 370 millions de dollars, procurant de l'emploi à des architectes, à des ouvriers du bâtiment, à des vendeurs et ainsi de suite. Une hausse connexe des taxes sur les revenus, les propriétés et les ventes a aussi contribué aux recettes fédérales, provinciales et municipales.
L'économie mondiale et l'industrie pétrolière
Si elle est parmi les plus rentables sur Terre, l'industrie pétrolière n'est pas dénuée de risques pour autant. Les cours du pétrole varient de jour en jour, et dépendent de toutes sortes de facteurs plus ou moins hors du contrôle des gouvernements et de l'industrie. Au nombre de ces facteurs, mentionnons les taux de consommation et de production dans le monde, la santé générale de l'économie planétaire et la situation sociopolitique des pays acheteurs ou producteurs de pétrole et de ses dérivés.
La consommation planétaire de carburant a augmenté au cours des dernières décennies, en partie à cause de la croissance démographique, de l'urbanisation accrue et de l'accélération du développement économique de pays très peuplés comme la Chine et l'Inde. Les populations en hausse des centres urbains industrialisés consomment plus d'énergie et réclament plus de produits du pétrole. La demande mondiale quotidienne de brut a connu une hausse régulière, passant d'environ 60 millions de barils au milieu des années 1990 à 88 millions en 2008.
Photographe inconnu. Avec la permission de Petro-Canada.
Si la demande de pétrole vient à dépasser la capacité d'approvisionnement de l'industrie, il est probable que les prix vont grimper. C'est ce qui s'est produit au début du 21e siècle, lorsqu'une croissance économique mondiale exceptionnelle a fait bondir la demande d'énergie. Le prix du brut a plus que doublé, passant de 11,11 $ le baril au début de 1999 à 25,66 $ le baril à la fin de 2000. Au cours des années subséquentes, des problèmes d'approvisionnement attribuables à des ouragans, la dépréciation du dollar américain, la guerre en Iraq (qui a affecté la production de ce pays pétrolier), l'industrialisation, la croissance démographique et la hausse des besoins en carburant des économies émergentes, associés à divers autres facteurs, ont fait exploser le cours du pétrole : le 11 juillet 2008, il atteignait la marque record de 147,27 $ le baril.
Cette tendance allait toutefois s'inverser au cours des mois suivants : alors que le monde était frappé par une crise financière, les prix du brut ont dégringolé. Cette situation a été largement attribuée à l'effondrement du marché hypothécaire américain en septembre 2008, qui a causé de graves pertes aux bourses du monde entier et forcé plusieurs grandes institutions financières des États-Unis et d'Europe à la faillite ou à un sauvetage par des subsides gouvernementaux. À la fin de novembre, les États-Unis, le Japon et nombre de pays d'Europe entraient en récession, tandis que le Canada annonçait qu'il pourrait lui aussi subir une récession en 2009. On dit d'un pays qu'il est en récession lorsqu'il connaît six mois ou plus de décroissance économique.
Le chômage et l'insécurité des emplois se sont rapidement aggravés vers la fin de 2008, alors que les industries du monde entier se débattaient pour demeurer rentables dans une économie faible et instable. Faute d'argent à investir, les particuliers, les industries et les pays ont réduit leurs achats de pétrole en 2009, provoquant une réduction de la consommation globale de carburant. Sur les marchés, la crainte que l'industrie pétrolière produise plus de pétrole qu'elle n'en peut écouler a eu un fort effet de refroidissement; ainsi, le 4 décembre 2008, le cours du brut léger avait chuté à 43,93 $ le baril et les représentants de l'industrie s'attendaient à ce qu'il continue de fléchir, de concert avec la baisse de la demande des régions consommatrices de pétrole.
Une chute des cours peut avoir un impact négatif sur l'industrie pétrolière de Terre-Neuve-et-Labrador en annulant les profits des sociétés productrices et en les décourageant d'investir dans de nouveaux projets. En août 2008, le gouvernement provincial prévoyait tirer un profit d'environ 20 milliards de dollars du projet Hebron, mais ses estimations reposaient sur un cours d'environ 87 $ le baril. Si le prix dépassait cette estimation de près du double en juillet 2008, il n'en était plus qu'à environ la moitié en décembre de la même année. La production à Hebron ne commencera pas avant 2017... Les cours pourraient alors s'être rétablis, mais il se peut aussi qu'ils restent faibles. Bien que l'industrie pétrolière ait été plutôt rentable de longue date, sa dépendance envers le marché international l'expose à nombre de risques et d'incertitudes.