Les premières tentatives de colonisation

Avant le 17e siècle, les Européens ne passent pas l'hiver en Amérique du Nord, sauf exceptionnellement, par exemple lorsque des pêcheurs basques se retrouvent prisonniers de la glace à Red Bay dans les années 1570. Un journal comptable, de la Cournailles, consigne un seul incident d'hivernage dans la baie de la Conception en 1609. C'est l'année précédant l'établissement de la colonie de John Guy à Cupids. Certains spéculent que les pêcheurs anglais laissaient souvent des hommes hiverner sur l'île à cette époque, mais c'est peu probable.

Le havre de Red Bay, Labrador
Le havre de Red Bay, Labrador
À Red Bay, les baleiniers basques préfèrent construire leurs installations à des emplacements situés près des eaux profondes et protégés des vents du nord-est et du sud-ouest. Ces installations servent surtout pendant la saison de la chasse à la baleine au Labrador. Au 16e siècle, les Basques (comme les autres pêcheurs européens) reviennent à leurs ports d'attache dans le golfe de Gascogne jusqu'à la prochaine saison de chasse.
Adapté avec la permission de Duleepa Wijayawardhana, 1998. Adapté et reproduit avec la permission de J. A. Tuck, Atlantic Archaeology Ltd. Tiré de Red Bay, Labrador: World Whaling Capital A.D. 1550-1600, James A. Tuck et Robert Grenier, Atlantic Archaeology Ltd., St. John's, T.-N.-L., © 1989, p. 38.

Sous le règne de la reine Élizabeth 1re, des écrivains préconisent la colonisation de Terre-Neuve. Parmi eux, quatre se distinguent par leur connaissance concrète de l'île : Anthony Parkhurst (1578), Edward Hayes (1586), John Mason (1620) et Richard Whitbourne (1620). Les premières tentatives de colonisation dans les années 1570 et 1580 n'aboutissent à rien. On croit à tort que la venue de Humphrey Gilbert à St. John's en 1583 constitue un premier pas vers la colonisation. Ce dernier s'intéresse plutôt à la côte du Maine, Norumbega, qu'il entend exploiter. En fait, St. John's ne représente pour lui qu'un havre qui lui permet de mieux se ravitailler en faisant pression sur les pêcheurs européens présents. Après leur arrêt à Terre-Neuve, Humphrey Gilbert et son compagnon Edward Hayes songent maintenant à une colonisation possible des territoires situés plus au nord. Toutefois, Humphrey Gilbert meurt noyé quelques semaines plus tard en se dirigeant vers l'emplacement de sa future colonie plus au sud. Edward Hayes, comme John Mason et Richard Whitbourne, ne dispose pas des fonds nécessaires à l'établissement d'une colonie. Ils ne peuvent qu'en faire connaître les avantages potentiels.

Les motifs des partisans de la colonisation de Terre-Neuve sont aussi diversifiés que prétentieux, mais les véritables avantages qu'offre l'île sont éminemment pratiques et concernent principalement la pêche. Par exemple, Richard Whitbourne, dans son livre intitulé Discourse and Discovery of Newfoundland [Terre-Neuve : conversation et découverte] (1620), la justifie, pour sa part, en évoquant les arguments communs à cette époque qui vont de la nécessité de convertir les autochtones au christianisme au besoin de délester l'Angleterre de son excès de population. Par contre, ses meilleurs arguments en faveur de la colonisation soulignent qu'elle renforcerait l'industrie de la pêche. Il suggère de laisser des hommes hiverner sur l'île pour assurer l'accès aux installations de transformation du poisson avant l'arrivée des autres pêcheurs. Cette situation favoriserait l'instauration d'un monopole du poisson séché. La suggestion cache peut-être une stratégie de la compagnie de Terre-Neuve qui soutient l'implantation de la colonie de John Guy à Cupids. Peu importe les motifs sous-jacents, ceux qui sont parvenus à établir solidement ces premières colonies ont axé leur survie sur l'industrie de la pêche.

En 1621, John Guy déclare à la Chambre des communes qu'il existe seulement trois véritables colonies à Terre-Neuve. Il pense probablement à Bristol's Hope (Harbour Grace), St. John's et la nouvelle colonie d'Avalon à Ferryland.

English version