Mine de pyrophyllite de Manuels
Inscrite dans la tradition d'exploitation minière dans la péninsule d'Avalon
A péninsule d'Avalon a une longue histoire d'activités minières. Tout le monde connaît les mines de fer de l'île Bell, mais rares sont ceux qui savent qu'une petite mine située près de Manuels, dans la baie de la Conception, existe depuis à peu près aussi longtemps. Comme son promoteur original, Frederick Andrews, on l'appelle localement la « Talc mine »(mine de talc), bien qu'on y exploite en réalité de la pyrophyllite, un minéral de composition différente du talc; les deux partagent toutefois certaines propriétés, dont la tendreté et une couleur pâle.
Après avoir acquis le terrain en 1902, Andrews y a entamé la production en 1904, faisant construire un transporteur aérien jusqu'aux installations portuaires et ferroviaires de Seal Cove. Après sa faillite en 1906, la mine a été rouverte par R. K. Bishop en 1909, pour fermer à nouveau en 1910. Au début, sans doute en raison de sa facilité d'accès, le minerai était extrait de petites carrières ouvertes sur les flancs de « Mine Hill », une colline voisine de la mine actuelle, où l'on peut toujours en observer les traces, notamment quelques amas de pyrophyllite. Les meilleurs gisements n'ont pas été exploités avant 1938, lorsque l'Industrial Minerals Company of Newfoundland Limited a percé la mine à son emplacement actuel; jusqu'à sa fermeture en 1947, elle en a expédié le minerai en Grande-Bretagne, aux États-Unis et au Canada.
En vertu de l'Undeveloped Mineral Area Act de 1952, le gouvernement de Terre-Neuve s'est porté acquéreur de la mine, qui a été ouverte à nouveau en 1956 par la société Newfoundland Minerals Limited, filiale de la future American Olean Tile Company. Une étude géologique de l'époque a annoncé la présence d'un filon de 1,5 million de tonnes de minerai à 300 pieds de profondeur. Au rythme de 10 000 tonnes par an, la mine avait un potentiel d'exploitation de 150 ans! Dans les faits, la mine a donné quelque 40 000 tonnes de pyrophyllite par an, et des forages subséquents ont accru les estimations, prolongeant sa production jusque tard au 21e siècle. La mine fut ensuite exploitée par un nouveau propriétaire, Armstrong World Industries Canada Limited, et ultérieurement par la société Trinity Resources Limited.
Les premiers efforts visaient surtout à extraire la pyrophyllite à l'état pur, plutôt que la roche minéralisée. Dans les années 1990, l'exploitation était fort différente : la roche abattue était triée visuellement, et le minerai était séparé des déblais pour être envoyé au concasseur. Après analyse, les échantillons de la roche concassée étaient mélangés en fonction des spécifications des manufacturiers et expédiés par bateau aux États-Unis, où ils servaient à la fabrication de tuiles de céramique de haute qualité. En outre, la pyrophyllite est un minéral tendre qui se prête bien à la sculpture; de telles œuvres, sculptées ou gravées, sont en vente dans les boutiques et les expositions d'artisanat locales.
Comment explique-t-on l'occurrence de pyrophyllite dans la région de Manuels? Ce minéral résulte de la transformation chimique de la roche volcanique au contact de liquides en fusion venus des profondeurs terrestres. Ces liquides peuvent aussi contenir d'autres métaux comme l'or et le cuivre : le gisement aurifère de Hope Brook, dans le sud-ouest de Terre-Neuve, s'est formé de cette façon. Comme les gisements de Manuels apparaissent dans des roches volcaniques similaires à celles de régions qui présentent des gîtes d'or, les géologues et les prospecteurs ont cherché ce métal précieux dans la région de Manuels. Des études réalisées par des prospecteurs privés et par le ministère des Ressources naturelles révèlent quelques anomalies. On trouve sur la carte des concessions minières de la région bon nombre de claims aurifères au voisinage du bail original de Frederick Andrews. L'histoire de l'exploitation minière de la péninsule d'Avalon est peut-être loin d'être terminée.
