Mis sur pied en avril 1917, le Newfoundland Forestry Corps était une unité militaire non combattante qui avait pour mission de fournir à la Grande-Bretagne le bois d'œuvre nécessaire à son effort de guerre. Ses quelque 500 bénévoles ont déboisé au-delà de 1 200 acres de forêt en Écosse avant la fin de la Première Guerre mondiale, le 11 novembre 1918.
Avec la permission de la Heritage Society of Grand Falls-Windsor, Grand Falls-Windsor (T. N. L.)
La demande en bois d'œuvre de la Grande-Bretagne a connu une augmentation marquée pendant la Première Guerre mondiale. Les forces armées britanniques avaient besoin de bois pour construire des abris, monter leurs barbelés sur les lignes de front, planchéier les tranchées boueuses et construire des traverses de chemin de fer en vue du transport des soldats et de l'équipement au front. L'industrie des munitions dépendait elle aussi d'un approvisionnement stable en poutres de bois pour l'installation d'étais dans les mines.
La Grande-Bretagne avait l'habitude d'importer son bois du Canada. Cependant, après le déclenchement des hostilités, elle ne pouvait plus le faire en raison de la présence de sous marins allemands qui perturbaient les voies maritimes. De toute manière, le Royaume Uni devait réserver une bonne part de l'espace déjà restreint de ses cales pour les marchandises de première nécessité, telles que des denrées alimentaires et des munitions.
Avec la permission de la Heritage Society of Grand Falls-Windsor, Grand Falls-Windsor (T. N. L.)
Devant l'impossibilité d'importer des quantités suffisantes de bois d'œuvre, le gouvernement britannique s'est tourné vers ses propres forêts, et, pour remédier à la pénurie de bûcherons, il a entrepris de recruter des volontaires au Canada. Le premier contingent du tout nouveau Canadian Forestry Battalion a débarqué en Angleterre en avril 1916, prêt à entreprendre les opérations. Il a été suivi par de nouvelles recrues qui ont été affectées en Angleterre, en Écosse et en France.
En mars 1917, les gouvernements de Terre-Neuve et du Royaume-Uni ont formé le Newfoundland Forestry Corps, constitué de 500 hommes. La Grande-Bretagne a absorbé les coûts de mobilisation et de maintien de l'unité, tandis que la Newfoundland Patriotic Association (NPA) s'est chargée du recrutement.
Le 4 avril 1917, sir Walter Davidson, gouverneur de Terre-Neuve, a publié un appel de volontaires pour recruter des bûcherons et des hommes qualifiés qui, sans être admissibles au régiment ou à la réserve navale, pourraient malgré tout servir dans les forêts du Royaume-Uni. Les exigences étaient moins sévères que pour l'enrôlement dans les forces armées, car le Forestry Corps était une unité non combattante. Les recruteurs acceptaient tous les hommes valides, indépendamment de leur âge et de leur taille. Selon Davidson, personne ne serait rejeté en raison de troubles de la vue, de pieds plats, de doigts manquants, de problèmes de surdité, etc.
Numéro du 7 avril 1917 de l'Evening Telegram
Le Forestry Corps a accepté 498 volontaires issus de Terre-Neuve (certains rapports font plutôt état de 494 hommes) et deux de Grande-Bretagne. Au total, 278 hommes ont été rejetés pour des raisons médicales. Parmi les membres figuraient des adolescents trop jeunes pour s'enrôler dans les forces armées, des hommes d'âge militaire jugés médicalement inaptes au service et des bûcherons trop âgés pour servir au sein du Newfoundland Regiment ou de la Royal Naval Reserve. Certains volontaires étaient d'anciens soldats et marins qui avaient été blessés outre mer et libérés du service actif.
Avec la permission de The Rooms, division des archives provinciales (VA 40-15.9), St. John's (T.-N.-L.)
Les volontaires venaient des quatre coins de l'île de Terre-Neuve. Ils étaient principalement issus de St. John's (167 hommes) et du district de Twillingate (129 hommes), une région englobant les villes papetières de Grand Falls et de Bishop's Falls. Les gérants des usines à papier de ces deux localités siégeaient au comité de foresterie de la NPA et encourageaient leur personnel à se joindre au Forestry Corps.
Avec la permission de la Heritage Society of Grand Falls-Windsor, Grand Falls-Windsor (T. N. L.)
Les 99 premières recrues ont quitté Terre Neuve à bord du SS Florizel le 19 mai 1917. Par la suite, d'autres bûcherons leur ont emboîté le pas à des intervalles réguliers. Les hommes ont d'abord été affectés à la forêt de la colline de Craigvinean, dans le domaine du duc d'Atholl, à Dunkeld, dans le Centre de l'Écosse. Le Forestry Corps a établi un camp au pied de la colline pour les travailleurs de la scierie et un second camp plus haut sur la colline pour les bûcherons.
Tiré du Newfoundland Quarterly 39.3 (1939)
Le transport des billots - qui pouvaient mesurer plus de 50 pieds - sur la pente abrupte et inégale jusqu'à la scierie représentait un défi de taille. Les bûcherons locaux étaient d'avis qu'il faudrait construire un chemin de fer sur la montagne, une tâche nécessitant beaucoup de temps, de main-d'œuvre et d'argent. Les Terre-Neuviens ont plutôt construit une glissière de 900 m de longueur qui permettait aux billots de passer rapidement du sommet au pied de la colline pour aboutir à un étang, où il ne restait plus qu'à en faire la drave jusqu'à la scierie.
Avec la permission de la Heritage Society of Grand Falls-Windsor, Grand Falls-Windsor (T. N. L.)
La glissière à billots était généralement considérée comme la plus longue du monde à l'époque. Aux dires du percepteur adjoint de l'approvisionnement en bois de l'Ecosse, cette innovation mémorable allait marquer une époque dans l'exploitation de la forêt en Écosse (Nicholson 475).
Avec la permission de la Heritage Society of Grand Falls-Windsor, Grand Falls Windsor (T. N. L.)
Au début de 1918, les Terre-Neuviens avaient déboisé 1 200 acres de forêt à Craigvinean. Ils ont ensuite été réaffectés au village écossais de Kenmore, à une quarantaine de kilomètres plus à l'est. Les hommes ont établi leur camp dans une forêt de 800 acres qui tapissait la colline Drummond et y ont poursuivi leurs travaux d'abattage jusqu'à la fin des hostilités. En janvier 1919, le Newfoundland Forestry Corps a progressivement cessé ses activités, et ses volontaires sont rentrés au bercail.
Photo de Jenny Higgins.
La statue d'un bûcheron terre-neuvien fait partie du monument national de guerre au centre ville de St. John's. Elle côtoie des statues représentant les hommes du Royal Newfoundland Regiment, de la Newfoundland Royal Naval Reserve et de la marine marchande.