La danse traditionnelle

À Terre-Neuve-et-Labrador, le talent pour la danse, au même titre que celui pour la musique, est héréditaire dans les familles de la province, croit-on. Comme toutes les autres traditions artistiques, elle se transmet par l'observation, la simulation et la répétition.

La danse « step »

L'influence de ce style particulier de danse se répercute dans les danses en couple et de groupe, mais il exige ordinairement que les danseurs s'exécutent sans partenaire et avec une touche d'improvisation, quoiqu'ils effectuent parfois des pas de danse communs. Les danseurs les plus admirés font preuve d'habileté et de légèreté. Le torse bien droit et les bras le long du corps, le jeu de pieds suit le rythme tout en respectant l'alignement du corps. Les danseurs atteignent une légèreté d'exécution en dansant d'un pied leste (plutôt qu'en sautant et en martelant le sol). Ce style de danse témoigne du rayonnement exercé par la danse traditionnelle irlandaise. On souligne avec admiration la virtuosité d'un danseur en précisant qu'il peut danser sur un mouchoir de poche.

On dit d'un danseur qui s'exécute avec grâce et subtilité qu'il semble flotter au-dessus du plancher. D'un danseur aux pas plus lourds, on remarque plutôt qu'il frappe le sol. Ceux qui dansent au son d'un violon favorisent des pas plus délicats pour mieux entendre le rythme de la musique. L'adoption plus répandue de l'accordéon dans les danses sociales permet aux danseurs d'accentuer plus fermement les pas au sol et de dégager leur propre sonorité. Cette manière de danser met en valeur l'habileté des danseurs à produire un son rythmique. Les pas au sol se transforment ainsi en instrument de percussion.

La danse « step », Conche, vers 1980
La danse « step », Conche, vers 1980
Dans la photo, Bernard et Dennis Byrne.

Avec la permission de Candace Cochrane. Tiré de Outport: Reflections from the Newfoundland Coast, de Candace Cochrane, éd. Roger Page, Addison-Wesley Publishers, Don Mills, Ontario, © 1981, p. 127.

Conformément aux règles, les danseurs sans partenaire de step ne se déplacent pas. Ce n'est pas le cas de la danse en couple qui accorde une certaine liberté. La valse à l'ancienne ou valse « terre-neuvienne » sur une mesure à ¾ est la danse traditionnelle la plus populaire. Elle permet de circuler dans la pièce.

La danse de groupe traditionnelle

À Terre-Neuve, les danses de groupe traditionnelles sont la contredanse [longways], la danse carrée, le branle écossais [reel] et le cotillon. Lors de son voyage à l'île dans les années 1950, la folkloriste anglaise, Maud Karpeles, dans sa documentation sur les danses traditionnelles, souligne qu'elles restent assez semblables à celles observées en Angleterre. (Maud Karpeles, p. 1).

Dans une contredanse, deux rangées de danseurs se font face, l'une constituée de femmes et l'autre, d'hommes. Les enchaînements et les figures amènent les couples à se déplacer progressivement vers le début de leur rangée. Vers la fin du 19e siècle, cette danse cède peu à peu sa place à la danse carrée tirant son origine du quadrille. (Colin Quigley, Close to the Floor, p. 46).

Le quadrille des lanciers est le plus populaire des quadrilles (danse carrée en cinq mouvements et quatre couples) au 19e siècle. Importé en Angleterre en 1817, il donne naissance à plusieurs variantes locales, dont probablement celles de Terre-Neuve. (Colin Quigley, Close to the Floor, p. 43). Ce quadrille est dansé en groupes de quatre et comporte plusieurs enchaînements importants, notamment les figures de l'étoile, du panier et de l'arche [thread-the-needle].

La danse du baiser est une autre danse populaire, à la fois danse et jeu. Maud Karpeles la consigne et en publie deux versions en 1956. Elle s'inspire peut-être d'une danse anglaise où les danseurs s'agenouillaient sur un coussin. Dans une variante de la danse du baiser, une personne se déplace en dansant dans la pièce, puis embrasse un membre du sexe opposé, leurs bouches séparées par un mouchoir. Cette personne remet ensuite le mouchoir à celle ou celui qu'elle vient d'embrasser avant de prendre cette personne par la taille. Ils dansent ensemble jusqu'à ce que le possesseur du mouchoir jette son dévolu sur une autre personne. Une rangée de danseurs se forme graduellement à mesure que le mouchoir passe de l'un à l'autre après chaque baiser.

Même si toutes les danses non-autochtones de Terre-Neuve-et-Labrador sont issues de la Grande-Bretagne, une danse de groupe appelée « running the goat » est originaire de la collectivité de Harbour Deep et s'accompagne de sa propre chanson traditionnelle.

La danse traditionnelle à l'honneur

Les mariages, les fêtes de famille, les événements communautaires représentent autant d'occasions de danser. Dans certaines collectivités, les célébrations de la Saint-Patrick servent aussi de prétexte, à la maison ou lors de fêtes communautaires, pour participer à une danse. À Noël, les gens se déguisent en « mummers » et vont de maison en maison. On y danse dans les cuisines. Dans une chanson très populaire intitulée « Mummers Song » interprétée par des chanteurs de l'île, le duo Simani, on y fait mention de personnes déguisées qui dansent en martelant le plancher de leurs pieds.

Les gens dansent simplement, un peu partout, aussi bien sur un quai que sur un pont par une belle soirée. Le protagoniste d'une chanson folklorique sentimentale raconte se balader sur les collines d'Old Flatrock et se rappeler de danseurs sur le pont :

On the Big River Bridge on an evening in June
To enjoy the village dancing by the light of the moon,
To hear the sound of happy laughter and an old time quadrille
In mind I'll still be there on the old Flatrock hills (Maynard 13).
[Sur le pont de la Big River par un soir de juin,
À regarder le village danser sous la lune,
À entendre les rires joyeux et la musique d'un vieux quadrille,
Me revoilà sur les collines d'Old Flatrock.] [Traduction libre]

English version