Création collective

Au Canada comme partout en Amérique du Nord, les années 1970 ont vu la naissance d'une nouvelle forme de théâtre. Qualifié d'alternatif, ce théâtre était animé par une nouvelle génération d'auteurs dramatiques, souvent formés en Europe ou aux États-Unis, qui brûlaient de sortir des sentiers battus. C'est ainsi que s'est popularisée la création collective, une forme de théâtre plongeant ses racines dans la tradition du documentaire. Ce qui distingue ce style de théâtre est son processus, par lequel une troupe d'acteurs recherche, improvise et crée un scénario. Les metteurs en scène ou les dramaturges peuvent prendre part à ce processus, mais leur rôle est le plus souvent périphérique.

Donna Butt, 1982
Donna Butt, 1982
Donna Butt, célèbre actrice terre-neuvienne, en spectacle au Arts and Culture Centre de St. John's.
Avec la permission de la Division des archives et collections spéciales (Coll-178), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's, T.-N.-L.

La création collective à Terre-Neuve et au Labrador

À Terre-Neuve et au Labrador, la création collective a dominé la scène durant les années 1970 et 1980. La Mummers Troupe a produit sa première création collective en 1973, pour être imitée dans les années 1980 par Rising Tide Theatre, le Resource Centre for the Arts, Sheila's Brush et d'autres troupes, créant ce qui allait devenir une forme de création collective typique de la province. Le dynamisme de sa communauté d'acteurs distinguerait ces productions; les créations collectives seraient de plus en plus dominées par des types de personnages brillamment interprétés par un large bassin d'acteurs aux talents multiples. Tandis que la création collective restait politique ou locale ailleurs au Canada, elle est devenue à Terre-Neuve et au Labrador la forme dramaturgique de prédilection pour tous les thèmes. Qu'il s'agisse, dans Joey, de l'histoire du premier ministre original de Terre-Neuve et du Labrador ou, dans Makin' Time with the Yanks, de la présence américaine durant la guerre, la compagnie recherchait, improvisait et rédigeait le scénario. Alors que cette forme de création disparaissait en Amérique du Nord au début des années 1980, elle allait demeurer la principale ressource théâtrale dans la province durant cette décennie. Ainsi, la saison 1986 du Resource Centre for the Arts aura été consacrée à un regard sur les créations passées.

LSPU Hall
LSPU Hall
Le LSPU Hall, construit en 1903 pour abriter le syndicat Longshoremen's Protective Union, abrite aujourd'hui une salle de théâtre au centre-ville de St. John's.
© 1998. Fondation du Patrimoine de Terre-Neuve-et-Labrador

La création collective a adopté toutes sortes de formes dans la province. Ainsi, la Mummers Troupe allait mettre de l'avant une veine politique caractéristique, tandis que CODCO allait exploiter l'humour noir et la satire. La troupe Sheila's Brush, inspirée à l'origine par la musique et la danse traditionnelles, a mis en scène des contes folkloriques dans ses créations, tandis que Rising Tide Theatre et le Resource Centre for the Arts évoluaient dans diverses directions, ce mandat élargi leur permettant d'associer à la fois création collective et pièces signées par un seul auteur.

Makin' Time With the Yanks, 1981-1982
Makin' Time with the Yanks, 1981-1982
Avec la permission de la Division des archives et collections spéciales (Coll-126, 7.10.001), bibliothèque Queen Elizabeth II, Memorial University of Newfoundland, St. John's, T.-N.-L.

La scène théâtrale de la province allait changer à la fin des années 1980, nombre d'acteurs formés à la tradition de la création collective devenant des dramaturges de talent. Si la formule ressurgit parfois à la faveur de spectacles annuels comme Revue de Rising Tide Theatre et de divers projets locaux, la création collective restera liée à cette période fertile et excitante des années 1970 et 1980 qui a vu la naissance de tellement de compagnies théâtrales.

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